Kampot, entre poivres et sels.

Kampot, Cambodia.

Après 130kms (3heures!) d'une route délicieusement dépaysante qui nous amène vers le sud du Cambodge, de la bruyante Phnom-Pehn à l'indolente Kampot, nous arrivons dans cette ville en bord de rivière, toute proche de la côte du golfe du Siam. 

Une légère brise riche en embruns marins nous accueille lorsque nous passons le premier rond-point de la ville qui représente un durian géant, fruit emblème de la ville (les Cambodgiens sont très forts pour construire des ronds-points très kitch et accueillants - peut-être le sujet d'un prochain article de blog??).

  1. Un peu d'histoire sur la ville de Kampot:

Avant l'arrivée des Européens, Kampot était un important port commercial, impliqué notamment dans le commerce entre le Siam (aujourd'hui la Thaïlande) et le Vietnam. La région était connue pour ses produits agricoles et ses ressources naturelles. À l'époque du protectorat, sous l'administration française à partir de la fin du 19e siècle, Kampot est devenue un centre administratif et commercial important. Les Français ont introduit de nouvelles techniques agricoles et développé l'infrastructure, laissant derrière eux une architecture coloniale distincte qui caractérise encore aujourd'hui le charme de Kampot. Après l'indépendance du Cambodge en 1953, Kampot a continué à prospérer, en particulier grâce à la production de poivre et de sel. Toutefois, la région a été durement touchée par les conflits du XXe siècle, notamment pendant la période des Khmers rouges. Depuis la fin des conflits, Kampot connaît une renaissance, attirant des visiteurs du monde entier grâce à son patrimoine, sa gastronomie et ses paysages naturels.

   2. Architecture et patrimoine de Kampot:

Les rues de Kampot regorgent d'anciens bâtiments coloniaux français, souvent peints en couleurs pastel. On appelle le quartier autour de l'ancien marché "le carré français". Certains batiments ont été restaurés pour accueillir des hôtels, des restaurants et des boutiques, pas toujours avec goût malheureusement, d'autres sont restés dans un état de délabrement qui les protège sans doute d'une restauration outrancière. Les batiments emblématiques de cette période sont le palais du gouverneur (qui abrite un musée rarement ouvert), l'ancien fish market (devenu un Starbuck en 2024...), le vieux cinéma (transformé en hotel), le vieux théatre (totalement à l'abandon) et une multitude d'autres batiments cédant ou non à la pression foncière de ces dernières années et qui font le charme désuet de Kampot.

Depuis le riverside refait à neuf et très agréable pour une promenade en fin d'après-midi, le vieux pont métallique enjambe avec grâce la rivière Teuk Chhou pour se rendre dans le delta où se trouvent les exploitations de sel, ou vers le Bokor. Cette montagne, en à-pic au dessus de la mer, était célèbre dans les années 20 pour rafraichir les occidentaux et respirer l'air marin. Marguerite Duras écrit sur la construction de cette route dans son livre "un barrage contre le pacifique" qui se déroule dans les environs de Kampot. Ce parc national offre aujourd'hui des randonnées à travers des paysages spectaculaires et des ruines coloniales, dont l'ancienne maison de vacances du Roi Sihanouk et l'église abandonnée, mais aussi des pagodes et lieux de culte spectaculaires.

Bien évidemment, le poivre est désormais indissociable du patrimoine de Kampot.

Le poivre, le trésor de Kampot.

Le poivre de Kampot est un poivre géographiquement protégé qui bénéficie d'une Indication Géographique (IG) depuis 2010, ce qui signifie que seuls les poivres cultivés et produits dans cette région spécifique peuvent être commercialisés sous le nom de "poivre de Kampot". Cette appellation garantit non seulement l'origine du produit mais aussi sa qualité exceptionnelle.

Tous les poivres de Kampot sont issus de la même plante, le piper negrum mais sont récoltés et travaillés de façons différentes pour obtenir le poivre noir, le poivre blanc, le poivre rouge, et le poivre vert. Chacune de ces variétés possède des caractéristiques uniques en termes de goût :

Poivre noir de Kampot : Il est réputé pour son piquant prononcé et ses notes épicées. Il est idéal pour assaisonner les viandes et les plats relevés.

Poivre blanc de Kampot : Obtenu à partir de baies mûres dont la peau est retirée, il est plus fort que le poivre noir et est souvent utilisé dans les plats où l'on souhaite éviter la couleur noire du poivre.

Poivre rouge de Kampot : Ce poivre est récolté à pleine maturité, ce qui lui confère un goût fruité et légèrement sucré, parfait pour les plats délicats ou, nous allons le voir, pour les desserts.

Poivre vert de Kampot : Une fois récolté, il se conserve seulement quelques jours frais, c'est sous cette forme que nous allons l'utiliser dans notre recette de crabe au poivre vert. Conservé dans du sel ou du vinaigre, le poivre vert a une saveur fraîche et légèrement piquante. La production du poivre de Kampot est un processus minutieux qui implique une attention constante et un savoir-faire artisanal. Les plans de poivriers sont cultivés dans un sol riche et bien drainé, et un climat tropical fort d'embrums marins typiques de cette région sud du Cambodge. Les plantations sont exploitées sur des petites collines appelées "phnoms". La récolte se fait à la main, les grains sont ensuite séchés, triés et traités par des processus naturels pour obtenir la variété souhaitée. Cette culture fait appel à un savoir-faire ancestral, oublié pendant la période des khmers rouges et relancé au début du XXièeme siècle pour le plus grand bonheur des gastronomes. 

Toutes les plantations ne sont pas certifiées Biologiques. Khla l'épicerie du Mékong se fait un point d'honneur à travailler an exclusivité avec une ferme certifiée BIO par un organisme international qui applique des règles très strictes en matière environnementale.

La culture du poivre de Kampot est si renommée à travers le monde, qu'elle en aurait presque occulté celle du sel, pourtant aussi importante en matière de saveurs et d'économie locale. Chez Khla, on a l'habitude de dire que le poivre et le sel de Kampot, ce sont le Ying et le Yang de cette ville.

Le sel marin, l'autre trésor de Kampot.

Moins connu que le poivre de Kampot, le sel de Kampot est un autre trésor culinaire de la région. Il est produit dans les salines de la province de Kampot et de la province voisine de Kep. Comme le poivre, le sel de Kampot bénéficie d'une indication géographique protégée, assurant sa qualité et son origine. Le sel de Kampot est récolté à la main selon des méthodes traditionnelles difficiles. Il est connu pour sa texture croquante et sa capacité à rehausser les saveurs des aliments sans être trop dominant. Ce sel marin est riche en minéraux et en oligo-éléments, ce qui lui confère des bienfaits nutritionnels supplémentaires. Le sel de Kampot peut être utilisé dans une grande variété de plats, des plus simples aux plus élaborés. Il est particulièrement apprécié pour saupoudrer sur des plats finis ou pour saler l'eau de cuisson des pâtes et des légumes. Chez Khla, nous cuisinons la fleur de sel de Kampot, au goût unique et léger. 

Pour la petite histoire, ce sont les saulniers de Guérande qui sont venus à Kampot après la période des khmers rouges pour ré-apprendre à la population la culture de la fleur de sel, dans une démarche de coopération bénéfique de sauvegarde et de reconstruction pour la région.

Au marché avec Chef Meng de Khla Lodge

Au centre de Kampot, le marché s'anime tous les jours de scènes particulièrement dépaysantes et de couleurs exotiques.

Les cinq sens sont en alerte pour les occidentaux que nous sommes, habitués à des environnements aseptisés :

Les odeurs sont violentes et animales,

Les couleurs débordent et exultent que ce soit avec les fruits et légumes, les viandes et poissons ultra-frais péchés quelques heures avant, jusqu'aux tenues des marchandes et celles des jeunes bonzes qui demandent leur pitance journalière en échange d'une bénédiction.

Les bruits et sons sont forts et puissants, les gens s'interpellent, négocient, on entend de la musique, des chants religieux, le bruit sec des couteaux qui tranchent les têtes des poissons (ou des poulets)

Les textures des fruits que l'on touche et que l'on goûte, les petites brochettes de calamars frais que l'on mange à peine sortis du brasero.

Les marchés au Cambodge sont un émerveillement, celui de Kampot en particulier. On ne connait bien un pays que si on passe du temps dans ses marchés.

Nous suivons Chef Meng dans ses achats pour notre repas de ce jour, Il vient tous les jours et connait mieux que personne les chalands du marché et leurs produits. 

Vous retrouverez prochainement la liste précise des ingrédients à acheter ainsi qu'une vidéo des recettes pas-à-pas. Vous pouvez vous abonner à notre chaine youtube Khla pour être alerté de chaque publication de nouvelle vidéo (et nous en avons un certain nombre en préparation....)

Après cet épisode chamaré, nous rentrons en tuktuk à Khla Lodge pour suivre la recette pas à pas.

En cuisine avec chef Meng à Khla Lodge

Nous voilà arrivés dans ce petit paradis qu'est Khla Lodge, à 10kms au nord de Kampot city, en bordure de la petite rivière qui se jète dans le Teuk Chhou. Ouvert en 2020 (quelques jours avant le confinement COVID...), cet établissement de seulement cinq chambres est le pied-à-terre d'Hippolyte et SreyMom. Au sein d'un jardin tropical sans nulle autre pareille, ces grands arbres centenaires surplombent une piscine aux dimensions extraordinaires, en surplomb sur la rivière. Ce lieu est unique et ressourçant et peut être réservé à la chambre ou privatisé pour des évènements www.khla-lodge.com

En plus d'être un lieu où la nature s'exprime avec une architecture khmère moderne particulièrement luxueuse, Khla Lodge a un jeune chef inventif et talentueux qui réjouit les voyageurs qui y séjournent.

Rentré du marché, Chef Meng se change et revêt sa toque, c'est parti pour la réalisation de deux plats mettant en avant les saveurs de Kampot avec les produits Khla :

Découvrez la vidéo du voyage de Khla, chapitre 1 : Kampot

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